Communiqué du 26 avril 2025
Epreuve anticipée de culture mathématique : RÉHABILITATION DES SAVOIRS DISCIPLINAIRES OU OPÉRATION DE DIVERSION ?
« C’est promettre beaucoup : mais qu’en sort-il souvent ? Du vent. » La Fontaine, La montagne qui accouche, Livre V, fable 10
Dans le cadre de son pseudo « choc des savoirs » censé répondre à la baisse de niveau constatée par les études internationales, Gabriel Attal alors ministre de l’Éducation nationale avait annoncé le 5 décembre 2023 que, « à compter de l’année scolaire 2025-2026, une nouvelle épreuve anticipée du baccalauréat en fin de 1ère générale et technologique sera[it] dédiée aux mathématiques et à la culture scientifique, pour l’ensemble de nos élèves » permettant de vérifier leur capacité à « comprendre les principaux objets mathématiques indispensables à tous, à résoudre des problèmes fondés sur des données et à construire un raisonnement logique. »
Il n’aura fallu pas moins d’un an et demi et quatre ministres pour que l’exécutif soit en mesure de présenter sa réforme au Conseil Supérieur de l’Education, un 1er avril (!) 2025.
EN QUOI CONSISTE LE PROJET MINISTÉRIEL
L’épreuve anticipée de culture mathématiques, passée à la mi-juin, consisterait en une épreuve écrite, d’une durée de deux heures, affectée d’un coefficient 2 (ces deux points étant pris sur le grand oral). Elle porterait sur le programme de première de l’enseignement de spécialité mathématiques pour les candidats ayant choisi cet enseignement, et sur le programme de l’enseignement de mathématiques spécifique intégré à l’enseignement scientifique pour les candidats n’ayant pas choisi l’enseignement de spécialité mathématiques, ainsi que sur le programme de première de l’enseignement de tronc commun Mathématiques pour les candidats de la voie Technologique.
Selon le projet de maquette adopté le 6 mars 2025, par le Conseil supérieur des programmes l’épreuve comporterait deux parties :
– la première, notée sur 8 points, évaluant des automatismes sous forme de questionnaire à choix multiple et à réponse unique (QCU).
– la seconde notée sur 12 points, porterait selon la situation des candidats soit sur le programme de mathématiques de tronc commun de la classe de première technologique, soit sur le programme de première de mathématiques intégré à l’enseignement scientifique pour les élèves de la voie générale ne suivant pas la spécialité mathématique, soit enfin sur le programme de spécialité mathématiques pour les élèves de la voie générale suivant cette spécialité.
La calculatrice ne serait pas autorisée.
EN QUOI LE PROJET EST INCAPABLE DE RÉPONDRE AUX OBJECTIFS AVANCÉS
Aux dires de Gabriel Attal, l’épreuve anticipée de culture mathématique à l’image de l’épreuve anticipée de français (EAF) permettrait de s’assurer de la maîtrise de la « culture commune » des candidats. Le parallèle s’avère pour le moins hasardeux. L’EAF est constituée non seulement d’une épreuve écrite d’une durée double de celle prévue pour l’épreuve anticipée de culture mathématique (EACM), mais aussi d’un oral, le tout pour un coefficient cinq fois plus important que celui annoncé pour l’EACM… Par ailleurs si tous les élèves de première générale ont droit à un enseignement de français
de quatre heures hebdomadaires, ceux d’entre eux qui n’ont pas choisi la spécialité mathématiques (34% en 2024-2025) doivent se contenter d’une heure et demie de mathématiques, ce qui apparaît insuffisant pour construire des repères solides.
Par-delà les discours officiels, le projet ministériel n’est qu’une ultime et vaine tentative de corriger, à la marge, la réforme Blanquer du lycée et du baccalauréat de 2018, pourtant largement rejetée par les personnels. Prenant acte de la difficulté de recruter des professeurs de mathématiques, l’exécutif avait alors décidé de retirer la discipline du tronc commun à partir de la classe de première. Devant le tollé que la mesure avait provoqué dans les milieux académiques et économiques, les mathématiques avaient été réintroduites à dose homéopathique, d’abord de manière facultative en 2022, puis obligatoire à partir de la rentrée 2023 sous la forme d’1h30 de cours hebdomadaires de cours inclus dans le module « Enseignement Scientifique. »
Il faudra plus que cette médiocre opération de communication pour convaincre l’opinion qu’une politique volontariste est menée dans notre pays pour rehausser le niveau de connaissances des élèves, notamment dans les domaines que le gouvernement considère comme fondamentaux : le français et les mathématiques. Ces deux disciplines font parties des plus touchées par la baisse de postes mis au concours du CAPES externe entre 2018 et 2025 : -188 en mathématiques, -371 en lettres modernes…
EN QUOI LES REVENDICATIONS RESTENT D’ACTUALITÉ
Tant que le service public de l’Education nationale restera soumis aux orientations actuelles conduisant à toujours plus de déréglementation, toujours plus de territorialisation, toujours plus de privatisation, toujours plus de paupérisation, il ne sera pas en mesure d’enrayer, chez les élèves, la chute pourtant alarmante du niveau en mathématiques comme, du reste, dans les autres disciplines.
Alors que le gouvernement prépare un nouveau train d’économies budgétaires de 40 à 50 milliards d’euros, il est plus que jamais nécessaire de se mobiliser aux côtés des familles, des personnels avec Force Ouvrière pour exiger :
– L’abrogation des contre-réformes remettant en cause les statuts et missions des personnels et l’accès à l’instruction des élèves : réforme Blanquer du lycée et du baccalauréat, Parcoursup, le « choc des savoirs », le pacte enseignant, l’acte 2 de l’école inclusive,
– la restitution des horaires disciplinaires dont les collégiens et de lycéens ont été privés au nom des politiques d’austérités visant à rationner le savoir,
– la réduction du nombre d’élèves par classe,
– le recrutement des professeurs à hauteur des besoins,
– l’augmentation immédiate de la valeur du point d’indice (+ 10 % tout de suite) et le rattrapage de la perte de 31,5% depuis 2000,
– le rétablissement du baccalauréat comme examen national, terminal, disciplinaire, ponctuel et anonyme, avec des temps de correction suffisant pour les membres du jury.