Communiqué du 04 octobre 2024
Acte 2 de l’école inclusive
Arrivée des DAR dans les collèges et les lycées
Cheval de Troie contre les statuts des personnels, à l’opposé des besoins des élèves !
En juin 2024, les personnels du collège J.Y. Cousteau dans l’Oise apprenaient qu’ils seraient en dispositif d’autorégulation (DAR) à la rentrée 2024. Il s’agit d’une « scolarisation des enfants dans la classe d’inscription qu’il fréquente majoritairement. Ponctuellement, il bénéficie de temps d’autorégulation dans une salle dédiée de l’école. Un accompagnement des élèves par une équipe d’un service médico-social en coopération avec l’équipe enseignante facilite l’inclusion scolaire. La scolarisation des élèves s’inscrit dans les programmes de l’éducation nationale et du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. » 28 personnels de cet établissement ont adressé un courrier au Recteur de l’académie d’Amiens pour protester sur le fait qu’à aucun moment, leur accord n’a été sollicité ; ils « demandent l’abandon immédiat de la mise en place du dispositif DAR au sein de notre établissement ».
De quoi il s’agit ?
Le dispositif DAR permet d’inclure des élèves avec des troubles du neurodéveloppement en classe ordinaire. Il est présenté dans une instruction ministérielle du 5 septembre (donc élaborée par le gouvernement démissionnaire). Ce dispositif est destiné à accueillir des élèves avec TND – troubles du neurodéveloppement : trouble du spectre de l’autisme [TSA], troubles spécifiques du langage et des apprentissages [dys], trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité [TDAH], trouble du développement intellectuel [TDI].
Les élèves sont orientés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes en situation de handicap (CDAPH). Ils arrivent en collège comme en lycée : « L’autorégulation est accessible aux élèves avec un TND (TSA, dys, TDAH, TDI) quelle que soit la modalité de scolarisation précédente, y compris dans le cas d’une rupture de parcours qui nécessite une attention particulière de la part de l’équipe pédagogique du lycée et de l’équipe pluriprofessionnelle d’autorégulation. »
Pour combien d’élèves ?
Si « à la création de l’équipe pluriprofessionnelle d’autorégulation, l’effectif comprend 10 élèves », et si « selon les situations, il peut être convenu, avec l’accord écrit de l’agence régionale de santé (ARS) et de la DSDEN de rester, pour une durée déterminée, en-deçà de l’effectif de 10 élèves avec TND (TSA, dys, TDAH, TDI) mais a minima de 7 », en fait « il n’y a pas de capacité maximum d’accompagnement d’élèves définie pour l’équipe pluriprofessionnelle d’autorégulation » !
Qui décide ?
« Le déploiement de l’autorégulation dans une école, un collège ou un lycée relève d’une initiative conjointe du recteur d’académie et du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS). »
Aucun AESH pour encadrer ces enfants. Des dispositions sont prévues (un enseignant supplémentaire non spécialisé affecté sur poste à profil, intervention de personnels médicaux sociaux, une salle d’ « autorégulation ») dont surtout, un partenariat quotidien entre tous les membres de l’équipe pédagogique, médico-sociale et périscolaire, un accompagnement des aidants et un partenariat fort avec les familles concernées ! Et le texte ministériel annonce la mise en place de réunions régulières pour réaliser ce partenariat…
Aux enseignants du collège de l’Oise, le Recteur ne prendra pas la peine de répondre. Peut être parce que le texte relatif au DAR n’était pas encore sorti en juin. Ou alors peut-être parce qu’à aucun moment, il n’est prévu de recueillir l’avis des enseignants !
Et pourtant, ceux de ce collège l’ont bien compris : « C’est ainsi à toute une équipe pédagogique, non formée et non préparée, qu’on demanderait de se mobiliser pour accueillir ce dispositif et de repenser certaines règles de fonctionnement […] et certains aspects de l’organisation générale du collège (par exemple : récréation, accueil en début de journée, pause méridienne. […] Quelles conséquences pour nos élèves qui sont déjà dans des classes très chargées avec déjà une multiplication des élèves à « profil », sans oublier l’inclusion des élèves ULIS et les élèves du dispositif Rabelais ?».
Quid des obligations règlementaires de service des enseignants ?
La question de la rémunération des enseignants face au travail supplémentaire imposé est totalement absente du texte. Qui peut croire que de telles dispositions permettront aux élèves concernés de suivre une scolarité complète ? Que devient le droit de ces élèves à sortir du système scolaire avec une formation leur permettant une réelle qualification ?
La réalité toute crue de ce dispositif a été donné par le Recteur de l’académie d’Amiens lors d’une audience. Le coût d’une scolarisation en enseignement spécialisé est de 45 000 euros par élève. Le financement d’un DAR est annoncé à 180 000 euros soit 18 000 euros par enfant si leur nombre ne dépasse pas 10 !
De fait, dans le cadre de l’Acte 2 de l’École inclusive, ce dispositif entérine l’externalisation des ESMS conformément à la volonté du précédent gouvernement de démantèlement de l’enseignement spécialisé.
Dans leur courrier au recteur, les personnels du collège J.Y. Cousteau concluaient :
« Nous ajoutons que l’annonce de cette expérimentation survient dans un contexte global déjà largement dégradé du fait de la mise en place de la réforme dite du « Choc des savoirs », déjà largement contestée dans notre établissement et qui va porter atteinte aux conditions d’apprentissage des élèves comme aux conditions de travail de l’ensemble des personnels. Dans ces conditions, nous demandons l’abandon immédiat de la mise en place du dispositif expérimental DAR au sein de notre établissement. »
ILS ONT RAISON ! Au collège Aliénor d’Aquitaine de Castillon-la-Bataille, dans l’académie de Bordeaux, la DSDEN a renoncé à mettre en place un DAR face au refus des personnels. Le SNFOLC appelle les personnels des établissements concernés par ce dispositif à se réunir avec les représentants FO, et si possible en intersyndicale, afin de s’organiser et de se mobiliser pour le refuser collectivement.
Est-on obligé d’assurer l’accueil des élèves dans la salle dédiée au DAR si les membres de l’équipe du service médico-social en sont absents ?
Comme il est prévu que ces personnels soient répartis sur plusieurs établissements, ils ne seront pas présents
en continu dans cette salle. La présence d’un adulte va se poser et l’on va forcément demander à un enseignant
d’accueillir ou d’encadrer ces élèves.
Aucune obligation ne peut être faite à un enseignant de prendre en charge ni même de surveiller les élèves dans cette salle ni ailleurs sans la présence d’un personnel médico-social. Le statut des enseignants ne l’autorise pas. Ni les missions d’enseignement ni les missions liées à l’enseignement n’autorise le professeur à se substituer à un personnel médico-social. Si on vous le demande, demandez un écrit et contactez le syndicat qui saura faire respecter vos droits attachés à votre statut.
Est-on obligé d’accueillir ces élèves dans nos classes sans la présence d’un personnel médico-social ?
Oui de la même façon que l’on accueille les élèves en situation de handicap avec ou sans AESH mais il est indispensable d’alerter la direction de l’établissement si vous ne pouvez assurer la sécurité de ces élèves. Il faut alors le signaler en remplissant le registre SST et alerter le syndicat et ses délégués à la formation spécialisée qui pourront intervenir à tous les niveaux