Communiqué du 04 avril 2020
Baccalauréat et Brevet 2020 : E.Philippe et J.M. Blanquer décrètent les examens par établissement
Pendant le confinement le ministre fait reposer la charge de la continuité pédagogique sur les enseignants, leur équipement informatique, leur forfait téléphonique, leur capacité à s’auto-former, au détriment de leur vie privée… et dans la même logique, en choisissant le contrôle continu, le ministre fait reposer l’organisation des examens sur les personnels, au cas par cas, établissement par établissement, aggravant les inégalités.
Les choix du ministre
Après l’annonce faite par Edouard Philipe la veille, le ministre l’a confirmé le 3 avril, en raison de la crise sanitaire, le brevet et le baccalauréat 2020 seront évalués en contrôle continu. Mis à part l’épreuve anticipée de français en première où un oral sera maintenu, la note de l’examen correspondra à la moyenne des trois trimestres, à l’exception des notes attribuées pendant la période de « continuité pédagogique ». Les jurys d’examens devront prendre en compte le livret scolaire (motivation, assiduité, résultats). Une session exceptionnelle de rattrapage est prévue en septembre pour les élèves qui n’auraient pas obtenu le baccalauréat en juillet. Les cours, quant à eux, auront lieu jusqu’au 4 juillet et l’assiduité des élèves sera prise en compte pour obtenir ces diplômes, sauf si la situation sanitaire l’interdit.
Dans l’incapacité de prévoir le calendrier du déconfinement, le ministre Blanquer a choisi la solution a minima. Elle présente pour lui un double avantage : elle ne coûte rien (le coût de l’organisation du bac et du brevet a été mis en avant à nouveau = 2 milliards) et elle transfère une nouvelle fois sur les établissements et les personnels la gestion des examens, à l’image de l’organisation des E3C…
La décision du ministre soulève de nombreuses interrogations et inquiétudes
Pour le SNFOLC, le choix de faire disparaître toute forme d’examen terminal et national constitue un dangereux précédent. Les circonstances sont exceptionnelles, mais pour mémoire, ni pendant la guerre, ni après Mai 1968, les épreuves nationales du baccalauréat n’ont été annulées. Pour le SNFOLC, il ne faudrait pas que les circonstances exceptionnelles permettent la généralisation du contrôle continu. Le ministre n’apporte aucune précision, ni garantie.
Puisqu’il envisage de faire passer en juin les épreuves anticipées de français sous une forme allégée, rien ne l’empêchait de prévoir des épreuves anonymes et nationales, même allégées, pour le baccalauréat comme pour le brevet. Il a préféré choisir l’outil central de sa réforme du baccalauréat : le contrôle continu.
Avec le contrôle continu, le diplôme 2020 devient un diplôme par établissement, ce qui va fortement accentuer les écarts entre les établissements en fonction de l’origine sociale des élèves, pénalisant les élèves les moins favorisés. Cela défavorise les élèves qui progressent tout au long de l’année.
La décision du ministre fait une nouvelle fois reposer la pression sur les personnels. En effet, avec la disparition d’un examen terminal et national le professeur devient l’évaluateur des candidats, ce qui l’expose directement aux pressions des élèves, des familles, de la hiérarchie. C’est déjà le cas avec les résultats des E3C qui viennent d’être communiqués aux élèves. S’en remettre aux jurys pour corriger ces inégalités n’est pas sérieux.
Pendant le confinement, les conditions de travail liées à la « continuité pédagogique » vont encore se dégrader
L’annonce précipitée du ministre complique encore plus le travail des enseignants. Les notes reçues pendant le confinement ne sont pas prises en compte. Comment aurait-il pu en être autrement puisque la « continuité pédagogique » du ministre a démontré qu’elle ne peut remplacer le cours en présentiel ?
De plus, comment motiver les élèves, y compris ceux des classes d’examen, quand le ministre vient d’annoncer que leur année scolaire a vraisemblablement pris fin le 12 mars du point de vue de leur évaluation ?
Cela relève du défi pour les enseignants confrontés aux nombreux obstacles du travail à distance. Ils peinent déjà à obtenir du travail de la part de leurs élèves pendant le confinement, alors, après une telle annonce, comment pourront-ils leur demander d’être assidus et de redoubler d’efforts, et de surcroît pendant les congés comme le veut le ministre dans le cadre de son opération « vacances apprenantes » ? Sur les réseaux sociaux, les élèves ont déjà fêté l’obtention de leur examen !
Après le confinement, encore plus de pressions ?
Le ministre menace : l’assiduité jusqu’au 4 juillet sera prise en compte dans l’obtention de l’examen ! En collège, les conseils de classe étant prévus à partir de la fin mai, les notes du troisième trimestre seront quasiment inexistantes. Sur quels cours pourraient-elles reposer quand une partie de la classe aura décroché pendant le confinement ? Si l’assiduité ne sera donc pas forcément synonyme de travail pour les élèves, il est certain qu’elle va se traduire par de nouvelles pressions sur les professeurs.
C’est le cas, pour l’épreuve de français de première, la réduction du nombre de textes à préparer ne résout rien, dans la mesure où le ministre vient de décider que l’année scolaire s’est arrêtée début mars.
De plus, le ministre ne garantit, ni pour les élèves ni pour les personnels, qu’ils pourront être dépistés avant ces épreuves ? Quelle garantie sanitaire sera fournie pour la reprise des cours ? Et pour la réunion des jurys ? Là encore, sur ces points, le ministre n’apporte aucune précision.
Le ministre annonce également une session de rattrapage en septembre pour les candidats « recalés ». Comment pourront-ils s’y préparer ? On voit alors à quoi vont servir le dispositif « vacances apprenantes » et les « colonies apprenantes » du ministre.
Pour FO, aucune pression ne saurait être exercée sur les professeurs pour qu’ils s’impliquent dans ce dispositif. A la reconquête du mois de juin prônée par le ministre, il n’est pas question d’ajouter le sacrifice des congés scolaires !
Le ministre choisit de sacrifier l’examen national et anonyme et de poursuivre sa réforme.
Constatant les irrégularités lors des E3C et les inégalités d’évaluation des enseignements de spécialité que les élèves de 1ère abandonnent, le ministre aurait tout aussi bien pu choisir de retirer les réformes du lycée et du baccalauréat. Or, elles sont intégralement maintenues tout comme la première session des E3C.
Si la deuxième session des E3C est annulée en raison du Covid-19, les notes de la première session, elles, sont maintenues et comptabilisées. Décision qui interroge quand des milliers d’élèves n’ont toujours pas repassé les épreuves reportées de la première session, et que 10 000 copies d’E3C ne sont toujours pas corrigées !
Le SNFOLC demande toujours que ces épreuves soient annulées. On ne passe pas le baccalauréat sous la menace des forces de l’ordre. Le ministre veut effacer la large contestation de ces épreuves intimement liées au baccalauréat Blanquer.
Pendant qu’il multiplie les messages de remerciements à l’attention des enseignants, dont il a plus que jamais besoin pour assurer la continuité pédagogique et son dispositif « vacances apprenantes », il n’annule aucune décision de sanction contre les personnels et les élèves qui se sont opposés aux E3C. Il a même autorisé le déblocage de l’application Mozar pour permettre aux recteurs de dépasser le seuil de quatre jours de retrait de salaire par mois pour les grévistes !
Le SNFOLC exige l’annulation de toute mesure à l’encontre des élèves et des personnels qui ont exercé leur droit de grève et d’exprimer leur légitime opposition aux E3C.
Le SNFOLC exige le respect des congés pour tous les personnels, le respect de leur liberté pédagogique et de leur droit à la déconnexion.
Le SNFOLC s’adresse au ministre pour avoir toutes les garanties que les modalités des épreuves décidées sont et resteront exceptionnelles. Pour le SNFOLC, c’est clair, il n’y a pas de confinement pour les revendications : abrogation de la réforme du lycée et du baccalauréat ; retour aux épreuves nationales, anonymes et ponctuelles.
Avec sa fédération, il exige que toutes les mesures de protection soient garanties pour les personnels.
Le SNFOLC condamne toute pression et tout dispositif qui, à l’instar de la loi d’état d’urgence sanitaire, conduisent à un travail sans limite, à l’épuisement des personnels, à la remise en cause des diplômes et des droits statutaires.